Près d’une dizaine de mamans de l’association des Amis de la Bienvenue ont participé au groupe de parole via zoom sur une question d’actualité : « comment dépasser la violence qui nous entoure aujourd’hui et aller vers un mieux vivre ensemble ? »
Ce fut pour nous une expérience extrêmement riche et constructive car le débat a permis à chacune de dévoiler des réflexions et états d’âmes sur les différentes formes de violences (physiques, psychologiques, morales).
Pour l’une des mamans, sensible au message de la fleur, sa manière de croire en l’humanité est de « donner confiance à ses enfants en leur expliquant que les mauvais jours finiront et que la Covid et le terrorisme ne seront plus que de tristes souvenirs. Il faut être patient et vivre. Leur transmettre un message d’optimisme : ils s’en sortiront » ; finit –elle par dire. Pour une autre, la violence s’exprime par le fait que les consignes sont contradictoires et ne permettent pas de savoir comment avancer. La question du port du masque illustre selon elle cette absence de clarté. Une autre maman déplore que la peur prime sur la solidarité dont nous avons besoin pour vivre ensemble. Celle-ci en a fait le constat dans le cadre de son activité professionnelle en milieu hospitalier. La violence selon elle n’est pas forcément physique, elle peut s’exprimer par l’incompréhension, l’ignorance, l’intolérance. Une violence qui ressort aussi dans les médias qui ressassent en boucle des informations parfois toxiques dont nous devons faire le tri. Une autre maman renchérit en évoquant un manque d’empathie des voisins envers ses enfants qui ont besoin de bouger et que le confinement dans des appartements étroits contraint péniblement. Avec quelques amis voisins, ils s‘étaient pourtant mis d’accord pour laisser les enfants jouer ensemble dans un espace de jardin en bas des immeubles mais ils se sont heurtés à une interdiction de la part d’autres voisins.
Une première maman réagit à l’histoire de l’indien et du cow-boy. Cela évoque pour elle les conflits intercommunautaires divisant le peuple ivoirien. Ses parents en ont pâti. Pourtant elle sait combien la tolérance est importante au nom de notre appartenance à une même humanité. Elle évoque par exemple le fait qu’au sein de sa propre famille, plusieurs religions coexistent.
Elle est chrétienne et une de ses filles s’est convertie à l’islam. Elle montre à travers ce témoignage, comment il est possible au sein même d’une même famille,
d’opérer des choix différents. Une autre maman raconte : les deux camps en conflit ont chacun leur légitimité pour revendiquer leur terre. Cela lui évoque d’autres conflits comme ceux d’autrefois dans son pays d’origine, et comme aussi entre palestiniens et israéliens. Elle a choisi la France, et cette terre est dans son « sang » car elle « l’a accueillie et lui a donné tout ce qu’elle n’avait pas eu là-bas ». Elle voudrait que ses enfants comprennent cela car elle sent son ainé perdu par moments. Elle craint pour ses enfants de mauvaises influences. Lui qui se veut loyal envers les musulmans et qui trouve notre société raciste doit comprendre que l’assassinat du professeur Samuel Patty n’en est pas moins odieux et condamnable et ne doit pas être imputé à tous les musulmans. Une autre maman exprime aussi sa reconnaissance envers la France à laquelle elle doit son émancipation par la culture, les apprentissages, et son parcours professionnel d’exception.
Plusieurs reviennent sur la peur de l’autre, perceptible même dans la rue où l’on s ‘écarte et où ne se dit même plus bonjour. Si quelqu’un tombe, on passe son chemin et même on conseille aux enfants de passer leur chemin : est-ce une bonne façon de leur apprendre à vivre ensemble ? Elles évoquent les dangers des chaines d’info en boucle ou des fake news. Leurs enfants privilégient souvent les réseaux sociaux où elles ne sont pas en mesure de suivre ce qui est dit ou montré.
Anne-Lise Schmitt et Annie Teboul